Epouvvantay


Vérité (La chose vaux pour ce que le valoir dennomine la vie)

La veritè a ete inventèe par la vie elle-meme; quoi de plus vrai que tuer le mal, la vergogne, la negation, le supporifique, le detestable, l`animalventure, la puenteur, le cocotage, le malparidage, l`accutumance, la desesperation, et ainsi nous pouvons dans mille ans, sans nous arreter, rencontrer le mal.

La vérité (du latin veritas, « vérité », dérivé de verus, « vrai »)1 est la correspondance entre une proposition et la réalité à laquelle cette proposition réfère. Cependant cette définition correspondantiste de la vérité n'est pas la seule, il existe de nombreuses définitions du mot et des controverses classiques autour des diverses théories de la vérité.

En mathématiques, une vérité première admise sans démonstration est un axiome.

La vérité est un concept abstrait qui se situe à la confluence, pour l'Homme, d'une croyance en un système issu de la conscience et représentatif de réalité, et de l'emploi du langage correspondant à cette vérité2 à laquelle s'applique le symbolisme phonétique.

Théories de la vérité ( Judaisme passiff)

Le correspondantisme, appelé aussi théorie de la vérité-correspondance, est l'ensemble des théories définissant la vérité comme une relation de correspondance entre un énoncé et une chose réelle. Un énoncé est vrai seulement s'il correspond à la chose à laquelle il réfère dans la réalité.

Cohérentisme ( Burlesquerie)

Le cohérentisme est l'ensemble des théories définissant la vérité comme une relation de cohérence systématique d'une théorie composée de multiples énoncés. Un énoncé est vrai seulement s'il fait partie d'un système cohérent d'énoncés.

Pragmatisme ( de pragmathoriums, mortandad)

Le pragmatisme est l'ensemble des théories définissant la vérité comme la propriété d'une croyance qui se révèle satisfaisante à la fin de l'étude. William James et Charles Sanders Pierce sont les deux grands représentants du pragmatisme.

Constructivisme ( Mensonges)

Le constructivisme est l'ensemble des théories selon lesquelles la vérité est le produit d'une construction sociale contingente.

Redondantisme ( peine Capitale)

Le redondantisme est la théorie de la vérité selon laquelle la vérité est indéfinissable car redondante. Le redondantisme est caractérisé par la thèse d'équivalence selon laquelle énoncer une proposition (affirmation) est équivalent à affirmer que cette proposition est vraie ; autrement dit : « p est vrai" » est équivalent à l'énoncé « p est » tout seul, ce qui revient à dire que « ...vrai » ne signifie rien de plus. Gottlob Frege est le premier à avoir défendu le redondantisme[réf. nécessaire].

Différentes formes de vérité ( Religions)

Une proposition exprime un jugement3 ; elle contient des mots qui renvoient à des concepts, elle a une structure interne, mais en même temps elle forme un tout : dès qu'elle exprime le jugement elle l'unifie, en ce sens qu'elle appelle de la part du récepteur une option qui prend la forme d'une acceptation, d'un refus ou d'un doute. La logique classique n'accepte que les deux premières possibilités : une proposition est vraie ou fausse4. Il serait possible d'objecter que le schéma binaire vrai-faux n'est pas pertinent du fait qu'il n'y a pas que des chats blancs et des chats noirs, mais beaucoup de chats de couleurs diverses. Ce serait oublier que, dans cette vision, le faux s'oppose au vrai, non comme le noir s'oppose au blanc, mais comme le non-blanc s'oppose au blanc5. Cependant, cette dichotomie vrai-faux est contestée d'un autre point de vue : que se passe-t-il si la réponse à la question posée n'est pas connue ? La position de Bertrand Russell est que la vérité des choses est indépendante de nos moyens de les atteindre ; tel n'est pas l'avis des intuitionnistes tels Roger Apéry qui propose en particulier de n'appliquer le principe du tiers exclu qu'aux objets mathématiques finis. Pour un intuitionniste une proposition est vraie si l'ensemble de ses démonstrations est habité et est fausse si l'ensemble de ses démonstrations est vide6.

Un autre problème a été soulevé depuis les Grecs : certaines propositions ne peuvent sans paradoxe se voir attribuer une valeur de vérité ; la plus connue est sans doute le paradoxe du menteur : « Cette affirmation est fausse ». D'autres affirmations peuvent être vraies ou fausses, au choix, ainsi que l'affirme le théorème de Gödel (plus précisément, on peut librement les choisir comme axiomes ou choisir leurs négations comme axiomes, ce qui revient à dire que leur vérité est conventionnelle ; le cas le plus connu de cette situation est le postulat d'Euclide, indépendant des autres axiomes de la géométrie).

Traitement des fonctions de vérité ( Loies institutionnelles)

Au xixe siècle, Boole, Schröder et Frege, parmi d'autres, s'attachèrent à dégager des structures ; Boole fut le premier à écrire la logique en symboles maniables ; il avait en vue une algébrisation du langage dans ce contexte sans cependant se préoccuper outre mesure des fondements ; Frege interpréta tout connecteur comme une fonction, inventant en 1879 le terme fonction de vérité7 pour signifier qu'en logique propositionnelle la valeur de vérité d'un énoncé composé ne dépend que des valeurs des énoncés simples à partir desquels il est formé, et non du contenu. En d'autres termes, les connexions sont utilisées au sens matériel ; car Frege avait ressuscité le conditionnel philonien8 dont il avait découvert l'efficacité.

Sémantique et syntaxe ( rethorique)

Articles détaillés : Logique et raisonnement mathématique, Complétude, Calculabilité, Théorème de complétude de Gödel et Théorème d'incomplétude de Gödel.

Quand on tente d'expliquer le sens d'une expression, on emploie d'autres expressions, ainsi dans un cadre déductif et prédicatif et dans une théorie donnée, il y a des concepts qui ne reçoivent pas de définition ; au début d'une théorie prédicative il y a des termes premiers ; prescrire lesquels est une affaire de choix9. D'autre part, une fois les termes premiers choisis, il faut une méthode pour construire les énoncés, et des règles de déduction, cela constitue la syntaxe.

Une « réalisation » d'un langage du premier ordre, ou encore structure pour ce langage, associe un élément sémantique - individu, relation ou fonction - à chaque élément syntaxique - respectivement symbole d'individu, symbole de prédicat ou signe fonctionnel10. Une formule est dite « valide » dans une structure si elle est satisfaite - donne donc lieu à un énoncé vrai - pour tous les individus de la structure11.

Un « modèle » d'un ensemble de formules est une structure qui rend valide chaque formule de l'ensemble (voir théorie des modèles). Une théorie est un ensemble de formules, si elle a un modèle elle est dite « satisfaisable ». Une formule est « universellement valide » si elle est valide dans toute réalisation du langage sur lequel elle est construite12. La question de savoir si tout énoncé sémantiquement vrai est syntaxiquement démontrable, ainsi que la possibilité ou non d'effectuer un test de vérité ou de fausseté mécanisable (ou programmable), dépendent de la théorie concernée.

Quine et nominalisme ( facebook)

Quine introduit des schémas ou modèles d'énoncés qui jouent en sémantique un rôle analogue à celui que d'autres auteurs font jouer aux « formules » de la syntaxe. Les énoncés sont des instances particulières de ces schémas, ils en résultent par substitution, la même expression étant substituée à toutes les occurrences d'une même lettre. Ainsi il peut arriver qu'un énoncé soit vrai en raison de sa structure logique seulement, par exemple :

« S'ils drainent l'étang mais ni ne rouvrent la route ni ne draguent le port ni n'assurent aux montagnards un marché, et par contre s'assurent à eux-mêmes un commerce actif, alors on aura eu raison de dire que s'ils drainent l'étang et rouvrent la route ou s'ils draguent le port ils assureront aux montagnards un marché et à eux-mêmes un commerce actif. »

Malgré les apparences, c'est en effet une lapalissade, comme l'on s'en assurera sans peine14, son schéma est du type : Si P et non-Q et non-R et non-S et T, alors [(P et Q) ou R] seulement si (S et T). Quine qualifie de tels schémas de « valides » ; il nomme « implication » un conditionnel valide, donc chez lui « implication » et « conditionnel » ne sont pas synonymes ; mais on retrouve bien le même concept de validité, implémenté différemment de la théorie classique.

Cette primauté de la sémantique provient de la philosophie nominaliste de Quine : les schémas sont des mannequins (« dummies ») qui n'appartiennent pas à un langage-objet ; les valeurs de vérité ne sont pas des objets abstraits mais des manières de parler des propositions vraies et des propositions fausses ; ces dernières sont les énoncés déclaratifs eux-mêmes plutôt que des entités invisibles cachées derrière eux15.

Selon un point de vue répandu, les sciences empiriques se caractérisent par le fait qu'elles utilisent ou devraient utiliser des méthodes inductives, partant de propositions singulières pour aboutir à des propositions universelles. Cependant, prise à la lettre, une telle extrapolation induit des risques d'erreur : peu importe le nombre de cygnes blancs que l'on a observés, rien ne pourra nous permettre d'affirmer que tout cygne est nécessairement blanc ; aussi Reichenbach adoucit-il cette prétention en avançant que les énoncés scientifiques ne peuvent atteindre que des degrés continus de probabilité dont les limites supérieure et inférieure, hors d'atteinte, sont la vérité et la fausseté16. Karl Popper conteste cette approche17.

À défaut de pouvoir prouver une théorie, on peut s'attacher à la réfuter. La théorie est corroborée si elle réussit les tests de réfutation18. À la « logique inductive » et ses degrés de probabilité, Popper oppose ce qu'il appelle une méthode déductive de contrôle19. Popper croyait à la vérité absolue comprise comme une catégorie logique ; il ne croyait pas que notre science puisse l'atteindre, ni même qu'elle puisse accéder à une probabilité du vrai ; en fait, il alla jusqu'à douter qu'elle constitue une connaissance : « La science n'est pas un système d'énoncés certains ou bien établis, non plus qu'un système progressant régulièrement vers un état final. Notre science n'est pas une connaissance - épistêmê - : elle ne peut jamais prétendre avoir atteint la vérité ni même l'un de ses substituts, telle la probabilité20. » Par là Popper s'oppose directement aux « pragmatistes » qui définissent la vérité scientifique en termes de « succès » d'une théorie21.

Et cependant il ne doutait pas que cette vérité existât quelque part. Il s'appuie pour cela sur les travaux de Tarski concernant la validité et les modèles, en particulier le concept de « fonction propositionnelle universellement valide » qui aboutit à l'existence d'énoncés vrais dans tous les mondes possibles22. Il en donne une traduction dans le domaine des sciences de la nature : « On peut dire qu'un énoncé est naturellement ou physiquement nécessaire si et seulement si on peut le déduire d'une fonction propositionnelle satisfaite dans tous les mondes qui ne diffèrent de notre monde, s'ils en diffèrent, qu'eu égard à des conditions initiales23. »

L'activité scientifique normale, dit Kuhn, est fondée sur la croyance que la communauté scientifique sait comment est constitué le monde24. Aussi a-t-elle tendance à laisser de côté provisoirement toute anomalie propre à ébranler ses convictions de base. Quand les spécialistes ne peuvent ignorer plus longtemps de telles anomalies, alors commencent les investigations extraordinaires qui les conduisent à un nouvel ensemble de convictions25 : c'est ce que Kuhn nomme une révolution scientifique. Ainsi, le développement historique de la science est-il fait d'alternances entre ce que Kuhn appelle des « périodes de science normale » où le savoir est cumulatif à l'intérieur d'un système conceptuel donné ou paradigme, et de « périodes révolutionnaires » qui voient s'opérer les changements de paradigme à la suite d'une crise.

Une partie des scientifiques résiste ordinairement à un changement de paradigme. On pourrait s'attendre à ce qu'il suffise d'une seule preuve pour rendre fausse une théorie ; pour Kuhn cependant, l'observation du comportement de la communauté scientifique montre que face à une anomalie les savants préfèrent élaborer de nouvelles versions et des remaniements ad hoc de leur théorie26. Les savants changent de paradigme lorsque les ajustements pour faire concorder leur paradigme et les anomalies ne sont plus considérés comme satisfaisants.

Ainsi, l'acte de jugement qui conduit les scientifiques à rejeter une théorie antérieurement acceptée est toujours fondé sur quelque chose de plus qu'une comparaison de cette théorie avec le monde26.

D'après Georges Van Riet, « les notions d'histoire de la philosophie et de vérité semblent antinomiques » si on suit la pensée de Hegel suivant laquelle « la vérité que recherche la philosophie étant éternelle et immuable, alors elle ne tombe pas dans le domaine de ce qui passe, et elle n'a pas d'histoire »30. Cependant, Hegel lui-même a proposé une philosophie de l'histoire, qui prétend résoudre cette contradiction en affirmant que les philosophies singulières ne sont que des étapes dans le développement progressif de la philosophie qui n'est rien d'autre que la marche de l'Esprit vers la prise de conscience de lui-même dans sa vérité31.

Selon l'historien de la philosophie Edouard Zeller, on peut distinguer deux périodes dans la philosophie présocratique : pour les premiers ioniens (Thales, Anaximandre,...), les pythagoriciens et pour Parménide, la question fondamentale est celle de la substance des choses : de quoi sont faites les choses? À partir d'Héraclite, "la question fondamentale est celle des principes du devenir et du changement"32. De Parménide, il nous reste des fragments de son poème De la Nature, dans lequel il oppose nettement deux voies de recherche : l'une est "le chemin de la certitude qui accompagne la vérité", l'autre est "ce qui se pense selon les opinions humaines". La première voie dit que l"Être est et qu'il n'est pas possible qu'il ne soit pas". L'autre dit que "l'Être n'est pas et nécessairement le non-être est"33.Comment comprendre cette notion parménidienne de l'Être"? Sébastien Charles oppose ceux qui font de Parménide le fondateur de la métaphysique : Hegel, Nietzsche et Heidegger (qui a consacré tout un cours à Parménide), et ceux qui à la suite de Burnet (Luc Brisson ou Yvon Lafrance), considèrent que l'Être parménidien ne désigne rien d'autre que le monde matériel dans sa globalité34. Toujours est-il que la pensée de Parménide s'oppose à celle d'Héraclite. "Pour Parménide, l'unité de l'être rend impossible la déduction du devenir et de la multiplicité; pour Héraclite, au contraire, l'être est éternellement en devenir."35

Scepticisme ( Cohabitation entre  le doute de la vie et la certitude de la mort)

Selon André Verdan, "les sceptiques ne disent pas que la vérité est insaisissable, ils disent qu'ils ne l'ont pas trouvée et qu'elle leur paraît introuvable, sans exclure l'éventualité d'une telle découverte"36. Le scepticisme commence avec les grecs. Pyrrhon a vécu au ive siècle av. J.-C. Devant la diversité des doctrines philosophiques, il est amené à prôner "l'époché" : la suspension du jugement et l'"aphasie" : le refus de se prononcer37. Au xvie siècle, Montaigne a repris et prolongé la pensée de Pyrrhon dans les Essais, notamment au chapitre "Apologie de Raymond Sebond" : selon lui, ni les sens ni la raison ne nous permettent d'atteindre la vérité. D'où sa fameuse devise : " Que sais-je" gravée en 1576 sur une médaille, avec l'image d'une balance en équilibre. Au xviiie siècle, David Hume va critiquer la métaphysique en montrant l'inaptitude de l'homme à atteindre la vérité absolue. Il défendra un scepticisme mitigé "consistant à limiter nos recherches à des sujets qui sont mieux adaptés à l'étroite capacité de l'entendement humain"38.

Platon s'oppose fondamentalement aux sophistes, leur reprochant de promouvoir une conception relativiste de la vérité (cf Protagoras et sa fameuse devise : "l'homme est la mesure de toutes choses") dans le but de manipuler le langage, la sophistique étant l'art de convaincre et de plaire. Contre cet usage du langage, il pose la question du "discours vrai"39, ce qui le conduit à formuler sa théorie des Idées, censées contenir toute vérité intelligible: les Idées (ou formes =eidos) sont des réalités parfaites, éternelles et immuables, dont les objets sensibles ne sont que des copies imparfaites. Pour trouver la vérité notre esprit doit donc se détourner de l'étude du réel sensible (allégorie de la caverne) pour se tourner vers ce réel seulement intelligible40.

C'est sur ce point qu'Aristote se sépare de son maître Platon. L'essentiel de sa critique se trouve dans Métaphysique I, 9; XIII et XIV. Pour lui, l'idée (ou forme) étant l'essence d'une chose ne peut être séparée de cette chose : "Comment donc les Idées qui sont substance des choses, seraient-elles séparées des choses"41? C'est la théorie de l'hylémorphisme selon laquelle tout être est composé d'une matière et d'une forme. Pour trouver la vérité, il faut donc étudier le monde sensible, dans le but de découvrir les causes des phénomènes car "connaître, c'est connaître les causes". C'est ainsi par exemple que Aristote a décrit des centaines d'animaux : il ne perdait jamais une occasion d'aller observer les poissons du lagon de Pyrrha dans l'île de Lesbos42; ou encore il s'est attaché à décrire les diverses constitutions des cités grecques43. La théorie aristotélicienne de la causalité distinguera quatre causes : la cause matérielle, la cause motrice, la cause finale et la cause formelle, qui désigne l'essence ou ce que Platon appelait "Idée".

Mais pour trouver les causes, il faut non seulement étudier les phénomènes, mais aussi savoir raisonner pour ordonner les éléments recueillis par l'observation. La connaissance scientifique suppose la démonstration44. C'est pourquoi Aristote consacrera de nombreux traités à l'étude de la logique de la pensée et du discours (logos, "parole", "discours", "raison")45, traités qui seront regroupés plusieurs siècles plus tard sous le titre d'"Organon" c'est-à-dire "instrument, outil" (de la science). Dans l'Organon Aristote distingue trois niveaux du discours auxquels correspondent trois opérations de l'intellect : le premier niveau est celui des mots dans lesquels nous pensons le concept ("homme"; "animal", "mortel") et dont s'occupe le premier traité : les catégories; le second niveau est celui des propositions qui relient les termes entre eux ("l'homme est un animal"; "l'animal est mortel"), grâce à l'acte du jugement, opération par laquelle nous affirmons ou nions un concept d'un autre concept. Comme le montre le second livre de l'Organon, De l'interprétation, c'est à ce niveau que nous avons des parties du discours susceptibles d'être vraies ou fausses, selon qu'elles correspondent ou non avec un fait réel. Enfin, au troisième niveau, nous trouvons l'étude du raisonnement qui relie les propositions entre elles pour construire des démonstrations. Dans les Premiers Analytiques, Aristote propose sa célèbre théorie du syllogisme dont le prototype traditionnel est : "Tout homme est mortel, Socrate est un homme, donc Socrate est mortel". Comme le fait remarquer Robert Blanché en reprenant l'étude de ce syllogisme : "La validité de ce raisonnement ne dépend pas des concepts qui y figurent"46. Le raisonnement reste valide même si on en change les termes, ou même si on remplace les termes par des lettres (des "variables") : Tout f est g ; x est f ; Donc x est g47. La logique se définit alors comme "la science des inférences valides"48, indépendamment de la vérité matérielle des propositions. Quant à la validité de l'inférence, elle repose à son tour sur le principe de contradiction, énoncé maintes fois par Aristote : "Il est impossible que le même attribut appartienne et n'appartienne pas en même temps, au même sujet et sous le même rapport"49.

Aristote a systématisé et codifié des modes de raisonnement qui étaient souvent demeurés très vagues ou implicites chez ses devanciers50. La logique d'Aristote chercha d'abord à dégager les conditions nécessaires de la vérité, qui résident dans la forme. Ainsi, un énoncé tel que « le mur bleu est rouge » n'a besoin d'aucun référent extérieur pour être déclaré faux51. La logique fournit l'instrument de la pensée correcte, pas la matière52. En termes kantiens, elle est la condition formelle de la vérité, mais non pas matérielle53.

Aristote porte surtout son attention sur les syllogismes tels que « tout A est B », « quelque A est B », où le sujet A et le prédicat B remplacent des concepts ; « tout A est un B » signifie que le concept B est attribuable à tout objet auquel on peut attribuer le concept A54. Aristote était conscient que les syllogismes ne pouvaient rendre compte de toutes les applications de la logique55,56 mais ils lui permettaient de poser des règles claires pour former la négation des énoncés, et aussi pour distinguer les rôles respectifs des universelles du genre « tout x est ceci » et des singulières du genre « y est cela »57.

Léonard de Vinci a un besoin de rationaliser jusqu'alors inconnu chez les techniciens. Avec lui, la technique n'est plus affaire d'artisans, de personnes ignorantes et de traditions plus ou moins valables et plus ou moins comprises par ceux qui étaient chargés de l'appliquer. George Sarton, historien des sciences, indique que Léonard de Vinci a recueilli une « tradition orale et manuelle, non une tradition littéraire »72.

C'est d'abord par les échecs, par les erreurs, par les catastrophes qu'il essaie de définir la vérité : les lézardes des murs, les affouillements destructeurs des berges, les mauvais mélanges de métal sont autant d'occasions de connaître les bonnes pratiques[réf. nécessaire].

Progressivement, il élabore une sorte de doctrine technique, née d'observations bientôt suivies d'expériences qui furent parfois conduites sur de petits modèles. Harald Höffding présente sa pensée comme un mélange d'empirisme et de naturalisme73. En effet, si pour Léonard de Vinci « La sagesse est la fille de l'expérience »74, elle permet de vérifier constamment ses intuitions et théories, car « L'expérience ne se trompe jamais ; ce sont vos jugements qui se trompent en se promettant des effets qui ne sont pas causés par vos expérimentations »74.

La méthode de Léonard de Vinci a certainement consisté dans la recherche de données chiffrées75 et son intérêt pour les instruments de mesure en témoigne. Ces données étaient relativement faciles à obtenir dans le cas des poutres en flexion par exemple, beaucoup plus compliquées dans le domaine des arcs ou de la maçonnerie. La formulation des résultats ne pouvait être que simple, c'est-à-dire exprimée le plus souvent par des rapports. Cette recherche effrénée de l'exactitude est devenue la devise de Léonard de Vinci, « Ostinato rigore - obstinée rigueur »76. C'est néanmoins la première fois qu'on voit appliquer de telles méthodes dans les métiers où on dut longtemps se contenter de moyens irraisonnés d'appréciation.

Ce faisant, Léonard en est arrivé à pouvoir poser des problèmes en termes généraux. Ce qu'il cherche avant tout ce sont des connaissances générales, applicables dans tous les cas, et qui sont autant de moyens d'action sur le monde matériel. Pour autant, sa « science technique » reste fragmentaire. Elle s'attache à un certain nombre de problèmes particuliers, traités très étroitement, mais il y manque encore la cohérence d'ensemble qu'on trouvera bientôt chez ses successeurs77.

René Descartes est considéré comme l'un des fondateurs de la philosophie moderne, en atteste cette phrase légèrement provocatrice : « Enfin Descartes vint78 ». Il formule le cogito79 - « je pense, donc je suis » - fondant le système des sciences sur le sujet connaissant qui fait face au monde qu'il se représente. En physique, il a apporté une contribution à l'optique et est considéré comme l'un des fondateurs du mécanisme. En mathématiques, il est à l'origine de la géométrie analytique80. Certaines de ses théories ont par la suite été contestées (théorie de l'animal-machine) ou abandonnées (théorie des tourbillons ou des esprits animaux).

Le Discours de la méthode s'ouvre sur la fameuse phrase « le bon sens est la chose du monde la mieux partagée »81, car le point de départ de Descartes est la raison (qu'il appelle aussi "le bon sens") qu'il définit comme la "faculté de bien juger et distinguer le vrai d'avec le faux". Cependant, il ne suffit pas de posséder la raison pour parvenir à la vérité : "Car ce n'est pas assez d'avoir l'esprit bon, mais le principal est de l'appliquer bien" (id). Il va donc élaborer une méthode, qui prétend rompre avec les interminables raisonnements scolastiques issus de la syllogistique aristotélicienne utilisée au Moyen Âge depuis le xiiie siècle82. Cette méthode se caractérise par sa simplicité (Descartes la résume en quatre règles dans le Discours de la méthode). Elle s'inspire des mathématiques, c'est pourquoi elle repose essentiellement sur l'intuition, acte de l'esprit qui saisit immédiatement une idée claire et distincte ou évidence, et sur la déduction qui enchaîne les intuitions pour construire la démonstration83.

C'est cette méthode qui va fournir un point d'appui pour guider le jugement dont la théorie est approfondie dans la quatrième méditation des Méditations métaphysiques, intitulée : de la vérité et de l'erreur. Dans le jugement Descartes distingue l'action de deux facultés : l'entendement qui nous permet de saisir des idées, (l'idée de l'homme, l'idée de Dieu), et la volonté qui nous permet d'affirmer ou de nier quelque chose à propos de ces idées (l'affirmation que Dieu a créé l'homme). Le problème vient selon Descartes de ce que notre entendement est limité (nous avons des idées plus ou moins claires) alors que notre volonté est infinie (rien ne limite notre pouvoir de choisir), ce qui nous amène à affirmer des choses que nous ne comprenons pas vraiment. Si nous appliquons la méthode, nous ne donnerons notre assentiment qu'aux idées évidentes, claires et distinctes, après un examen soigneux qui exclut toute précipitation et prévention, et nous ne tomberons jamais dans l'erreur. Comme le dit Dominik Perler : "la genèse de l'erreur ne dépend pas simplement de ce qu'appréhende l'intellect. Elle dépend bien plus de la discipline avec laquelle procède la volonté"84.

Se pose alors la question de la fiabilité de la correspondance d'idées claires et distinctes avec des réalités, conformes au contenu de ces idées. Descartes s'appuie alors sur ce qu'il présente comme les preuves de l'existence de Dieu, tirées de son idée même de Dieu, pour se sortir de cette aporie. Dès lors que Dieu existe, et que les idées innées85 sont créées par lui en mon entendement, elles ne sauraient être fausses, puisque Dieu ne saurait être trompeur. Cependant, nombre de commentateurs ont vu là un "cercle argumentatif" dans la mesure où Descartes affirme que les idées claires et distinctes sont fiables parce que Dieu existe, mais "nous savons que Dieu existe parce que nous avons de lui une idée claire et distincte"86. Ainsi l'erreur existe, mais ne provient ni de notre nature ni de notre entendement et des idées déposées en lui, mais d'un mauvais usage de notre volonté, dont nous sommes les seuls responsables. Pourtant certaines idées confuses ou obscures incitent tant le jugement à se tromper qu'on peut voir en ces idées une source de l'erreur, ou « erreur matérielle ». En effet, certaines idées (les idées des "qualités sensibles") sont si obscures que l'entendement ne sait trop ce qu'il y pense. Qu'est-ce par exemple que le froid ? Une réalité positive, une qualité qui appartient à l'objet, ou bien simplement l'absence en nous d'une sensation de chaleur, soit un manque, un néant ? Celui qui ne se repaît que de telles idées sensibles est pour ainsi dire condamné à l'erreur, ou du moins au scepticisme.

Le correspondant anglais de Descartes, Thomas Hobbes, dont les critiques seront fort mal reçues par René Descartes, développera, contre cette conception dite éidétique de la vérité, une conception qui assimile le raisonnement à un simple calcul, conception dite computationnelle. Un jugement vrai repose sur des règles, des opérations, de calcul, sur la base de mots, et non sur l'évidence. Descartes refuse explicitement l'éventualité d'une machine à produire de la vérité, car une machine ne saurait penser. Leibniz, au contraire, à la suite de Hobbes, défendra l'idée qu'un calcul sourd ou aveugle peut très bien aboutir à des résultats exacts, sans jamais passer par l'évidence d'un contenu, intellectuel ou même empirique. Le même Leibniz, citant l'esprit de finesse de Pascal, expliquera qu'une idée confuse peut néanmoins être vraie, en ce sens qu'elle nous donne une idée globale, inanalysable, de son objet : Discours de Métaphysique.

Le passage suivant, tiré des Pensées métaphysiques, donne l'impression que Spinoza, philosophe du xviie siècle, conçoit la vérité comme l'adéquation de l'idée avec son objet (ou idéat) :

« Les idées ne sont pas autre chose en effet que des récits ou des histoires de la nature dans l'esprit. Et de là on en est venu à désigner de la même façon, par métaphore, des choses inertes ; ainsi, quand nous disons de l'or vrai ou de l'or faux, comme si l'or qui nous est présenté racontait quelque chose sur lui-même, ce qui est ou n'est pas en lui87. »

Mais Spinoza lui-même définit ainsi l'adéquation au début de la deuxième partie de son Éthique :

« Définition IV. Par idée adéquate j'entends une idée qui, considérée en soi et sans égard à son objet, a toutes les propriétés, toutes les dénominations intrinsèques d'une idée vraie. »

L'adéquation repose donc sur un critère intrinsèque de vérité, d'où s'explique le mode géométrique et « génétique » de construction de son système philosophique.

Ainsi, nous connaissons adéquatement un objet quand nous le construisons à partir de ses causes, quand donc nous le concevons. En revanche, la connaissance par les sens est, elle, forcément tronquée et incomplète. Ce que nous percevons par les sens exprime davantage notre propre nature que celle de l'objet perçu. L'on ne saurait expliquer cela plus avant sans entrer dans le système philosophique de Spinoza.

De plus, Spinoza rejette la conception cartésienne, selon laquelle le jugement est le produit d'une volonté qui affirme librement la vérité ou la fausseté d'une idée. Selon Spinoza, chaque idée enveloppe sa propre affirmation qui n'est pas le fait de quelque libre arbitre extérieur à cette idée singulière. Ainsi, dit-il, nous ne pouvons pas penser que 2 et 2 font 4 sans ipso facto l'affirmer. Nous ne pouvons suspendre notre jugement que si d'autres conceptions remettent en cause la valeur d'une conception première. Ainsi, quand nous rêvons, nous sommes généralement incapables de douter de ce que nous percevons, et pourtant, une fois éveillé, il nous est très facile de nier notre rêve. Pour autant, une idée fausse est qualitativement, intrinsèquement, différente d'une idée adéquate. L'idée vraie nous permet d'un même geste de comprendre pourquoi elle est vraie, et pourquoi les idées fausses sont fausses. Le vrai est index de soi-même et du faux, dit Spinoza (index sui et falsi).

Spinoza distingue donc trois genres de connaissance :

  • la connaissance du premier genre est appelée "opinion" ou "imagination"; c'est la connaissance par "ouï-dire" ou par "expérience vague", c'est une connaissance qui peut être utile, mais qui reste fondamentalement incertaine;
  • la connaissance du second genre est la connaissance rationnelle; elle est fondée sur la démonstration et donc sur l'enchaînement déductif (les fameuses "chaînes de raison" dont parlait Descartes);
  • la connaissance du troisième genre ou connaissance intuitive, est celle qui engendre un système d'idées adéquates à partir de l'idée de Dieu=la Nature ("Deus sive Natura", Dieu ou la Nature), point de départ nécessaire de toutes nos déductions rationnelles. Comme le dit Spinoza, cette science intuitive "procède de l'idée adéquate de l'essence formelle de certains attributs de Dieu, vers la connaissance adéquate de l'essence des choses"88.

Ainsi, Spinoza ne reprend pas la conception classique de la vérité comme correspondance de l'idée et de l'objet. En disant que la vérité est une caractéristique intrinsèque de l'idée adéquate, Spinoza retrouve l'inspiration mathématique de Descartes et sa définition de l'intuition évidente comme "idée claire et distincte"....

Négation 

(Dire non au non, etait le proverbe de dieux des dieux, falssificateur de la negation elle meme: Le mal fait tout mauvaissement, de facon a se tromper tout en se croyant la vie, de facon a se pencher vers l`enfer illuminant lui meme sa merde, son peuple, les demons; c`est a dire rien que lui-meme et en plus)

En linguistique, la négation (du latin negare, nier)1 est une opération qui consiste à désigner comme fausse une proposition préalablement exprimée ou non ; elle s'oppose à l'affirmation.

Bien que nécessairement liés aux différents concepts de négation en logique, les multiples faits de langue correspondants posent des problèmes d'interprétation spécifiques, qui sont étudiés dans un cadre non strictement syntaxique ou monolinguistique. Les points de vue des linguistes sont variés, discutés et parfois contradictoires.

Comme beaucoup de termes abstraits similaires, le mot négation prend plusieurs sens qui, plutôt qu'à des cas d'homonymie ou même de polysémie, correspondent aux différents aspects d'un même concept :

  • le noyau conceptuel fondamental de nier (qui possède lui-même une sémantique multiple, comme on le verra) ;
  • l'ensemble des mécanismes linguistiques qui servent à nier2 ;
  • l'opération morphosyntaxique dans laquelle un item lexical nie ou inverse la signification d'un autre item lexical ou d'une construction3 (on emploie le verbe négativer, ou parfois négatiser pour exprimer cette transformation) ;
  • la caractéristique, d'un point de vue formel ou sémantique, d'un énoncé ou d'un constituant négatif ;
  • l'énoncé négativé, par rapport à l'énoncé de référence (donc le résultat de l'opération de négation).

On l'utilise aussi parfois pour représenter un morphème ou lexème employé pour exprimer la négation, quoique dans ce cas l'on parle plutôt de négateur.

Si la notion même de négation apparaît comme l'une des plus fondamentales de l'esprit humain (« toutes les langues actuellement décrites comportent un (ou plus d'un) morphème négatif, analogue au français ne... pas »)4, sa définition linguistique fait l'objet d'interprétations diverses. Elle peut notamment être considérée comme :

  • une catégorie à part entière dans le cadre de la dualité affirmation-négation, au même titre que le temps, l'aspect, la voix, etc. ;
  • une modalité parmi d'autres, c'est-à-dire le reflet d'une attitude du locuteur vis-à-vis de l'énoncé (un jugement, ou modus) ;
  • ou encore une partie intégrante de ce qui est asserté (le dictum).
« Un contenu refoulé de représentation ou de pensée peut s'introduire dans la conscience sous la condition qu'il se fasse nier. La négation est une manière de prendre conscience de ce qui est refoulé, et même proprement une suppression du refoulement, mais qui n'est cependant pas une admission de ce qui est refoulé... Il en résulte une sorte d'admission intellectuelle de ce qui est refoulé, l'essentiel du refoulement subsistant néanmoins. »

D'une façon générale et quelle que soit la langue, la négation est toujours marquée, c'est-à-dire qu'une assertion non marquée est considérée, par défaut, comme affirmative. Le statut linguistique de la négation n'est donc pas équivalent à celui de l'affirmation.

En fait, comme le remarque Antoine Culioli5, « il n'existe pas, dans quelque langue que ce soit, de marqueur unique d'une opération de négation » : le terme de négation recouvre donc une réalité multiple.

Par rapport à la négation logique ou mathématique (voire désormais informatique), la négation linguistique apparaît comme beaucoup plus complexe. On peut remarquer :

  • qu'elle ne porte pas obligatoirement sur l'ensemble d'une phrase, ou d'un prédicat, mais peut aussi s'appliquer à un constituant d'énoncé ;
  • qu'elle ne se limite pas à une opposition binaire de type « tout ou rien », ni à la notion de complémentaire ;
  • qu'elle ne concerne pas que les phrases déclaratives, qui ne constituent qu'un sous-ensemble des phrases possibles ;
  • que ses vecteurs grammaticaux sont multiples ;
  • que son usage dépend de la langue, de la culture et de l'époque concernées.

Types de phrase et négation

En grammaire traditionnelle, on distingue habituellement6 trois (ou quatre) types principaux de phrases simples :

  • la phrase déclarative (ou assertion) ;
  • la phrase interrogative ;
  • la phrase impérative (ou injonctive) ;
  • (la phrase exclamative).

La négation peut se superposer au moins aux trois premiers types (on parle de forme négative, ou de transformation négative) ; il s'agit donc d'une notion complémentaire, qui ne se situe pas sur le même plan (même si Maurice Grevisse par exemple7 distingue du point de vue de la forme des propositions affirmatives, négatives, interrogatives et exclamatives) :

ex. : Le chien a mangé la saucisseLe chien n'a pas mangé la saucisseex. : Les enfants jouent-ils au ballon ? Les enfants ne jouent-ils pas au ballon ?ex. : Descends la poubelle ! → Ne descends pas la poubelle !

On remarque toutefois que dans le cas de la phrase interrogative, la transformation négative n'a généralement de sens que pour une question de type oui / non (interrogation « totale »), et non pour les interrogations dites « partielles » :

ex. : Combien de voitures as-tu vu passer ? * Combien de voitures n'as-tu pas vu passer8?ex. : Quelle est la couleur de cette chemise ?* Quelle n'est pas la couleur de cette chemise ?

« Un contenu refoulé de représentation ou de pensée peut s'introduire dans la conscience sous la condition qu'il se fasse nier. La négation est une manière de prendre conscience de ce qui est refoulé, et même proprement une suppression du refoulement, mais qui n'est cependant pas une admission de ce qui est refoulé... Il en résulte une sorte d'admission intellectuelle de ce qui est refoulé, l'essentiel du refoulement subsistant néanmoins. »

De surcroît, même lorsque la négation est acceptable, la valeur illocutoire de l'interrogation lui attribue souvent une signification ou une nuance particulière (politesse, etc. ; voir plus bas).

Panneau en anglais « Défense d'entrer » (litt. « N'entrez pas »)

La phrase injonctive négative peut exprimer la défense, l'exhortation (Ne jetez pas vos déchets n'importe où, Ne nourrissez pas les animaux), l'interdiction (« prohibitif », fréquemment avec l'infinitif en français : Ne pas jeter de déchets), mais aussi le conseil, etc. (Ne crois pas tout ce qu'il raconte). Dans bon nombre de langues, comme le sanskrit (voir plus bas), le grec ancien, l'arménien, le morphème négatif utilisé dans ce cas diffère du morphème utilisé dans les déclaratives.

La phrase exclamative, lorsqu'elle ne constitue pas simplement une emphatisation d'une déclarative (ex : On a gagné !) pose également des problèmes de négativation, du moins en français :

ex. : Que ce paysage est beau !* Que ce paysage n'est pas beau ! (On utilisera plutôt l'antonyme : Que ce paysage est laid !). (Litote)

Dans le cas des phrases complexes, la négation peut s'appliquer à une proposition particulière (principale ou subordonnée), ce qui rend épineuse la question de la valeur de vérité de la phrase dans son ensemble :

ex. : Si tu n'étais pas arrivé en retard [subordonnée conditionnelle négative, contrefactuelle], on aurait pu attraper le bus.ex. : Je ne peux admettre [principale négative à valeur modale] que les choses se soient passées ainsi.

Nature grammaticale

Carte du World Atlas of Language Structures illustrant la nature des morphèmes signalant la négation en proposition indépendante dans diverses langues du monde.

La nature grammaticale des morphèmes utilisés pour exprimer la négation varie selon les langues et le contexte d'énonciation. On peut mentionner :

  • des adverbes (ex. ne... pas, non) ;
  • des adjectifs (ex. aucun, nul) ;
  • des verbes (ex. nier, ignorer) ;
  • des verbes auxiliaires, comme dans de nombreuses langues ouraliennes ;
  • des pronoms (ex. rien, personne) ;
  • des prépositions (ex. sans, sauf) ;
  • des conjonctions de coordination (ex. ni) ;
  • des conjonctions de subordination (ex. sans que) ;
  • des préfixes (ex. in-, non-, a-) ;
  • des suffixes incorporés à la forme verbale, comme en turc ou en japonais ;
  • des substantifs possédant une valeur sémantique négative intrinsèque (ex. carence) ;
  • des propositions à valeur modale (ex. ce n'est pas que, il est faux de dire que, je conteste l'idée que), etc.
  • et même des tons, par ex. en dioula9 : [ɔnhɔn] (tons bas / haut) « oui », [ɔnhɔn] (tons haut / bas) « non ».
« Un contenu refoulé de représentation ou de pensée peut s'introduire dans la conscience sous la condition qu'il se fasse nier. La négation est une manière de prendre conscience de ce qui est refoulé, et même proprement une suppression du refoulement, mais qui n'est cependant pas une admission de ce qui est refoulé... Il en résulte une sorte d'admission intellectuelle de ce qui est refoulé, l'essentiel du refoulement subsistant néanmoins. »

On peut distinguer négation lexicale (impossible) et négation grammaticale (il ne viendra pas)10.

On voit que les morphèmes de la négation sont aussi bien incidents à la phrase ou au verbe (c'est le cas des adverbes négatifs) qu'au lexème (c'est le cas des affixes).

Les adverbes de négation sont parfois regroupés dans la catégorie des adverbes d'opinion, au même titre que les adverbes d'affirmation (ex. oui, certes, parfaitement) et de doute (ex. probablement, vraisemblablement)11.

Fréquence des termes négatifs[modifier 

À titre indicatif, une analyse de fréquence sur un corpus composite en langue russe de plus d'un million de mots12 indique que le mot ne (« ne pas ») est 3e en russe (1,82 % du total), derrière v (« dans », 4,06 %) et i (« et », 3,43 %) - et ce sans compter les nombreux adjectifs et adverbes commençant par les préfixes ne- ou ni-. Net (« non » ou "si") arrive 51e (0,20 %), ni (« ni ») 79e (0,14 %) et bez (« sans ») 81e (0,13 %). Ničto / ničego, nel'zja, nikto, nikogda (« rien, il ne faut pas, personne, jamais ») représentent chacun entre 0,03 % et 0,06 % du total.

Signification de la négation

Selon Willard van Orman Quine, « le critère sémantique de la négation est qu'elle change toute phrase courte qui serait de nature à inciter à l'assentiment en une autre qui inciterait au dissentiment, et vice versa »13.

Une primitive sémantique

Dans sa quête des primitives sémantiques universelles, Anna Wierzbicka14 admet que, parmi les universaux lexicaux, la négation (qu'elle définit comme un « métaprédicat ») est « probablement celui qui est le moins sujet à controverse ». Pourtant, elle n'a introduit NOT dans sa liste de primitives que tardivement : les versions initiales (1972, 1980) incluaient à la place « don't want », ou « diswant » (littéralement « veux pas »), la négation étant considérée avant tout comme un rejet.

Ce qui l'a conduite à réviser sa position (« 'not' is simply 'not', and it cannot be reduced to anything else »15) fut l'étude de l'acquisition du langage par les enfants. Elle aboutit, avec Lois Bloom16, à considérer trois usages fondamentaux de la négation chez l'enfant :

  • la non-existence (il n'y a pas) ;
  • le rejet (je ne veux pas), qui pourrait représenter une négation prélogique17 ;
  • la dénégation (ce n'est pas).

Toutefois, elle conserve une réticence à considérer la négation comme équivalente entre les oppositions Je veux / je ne veux pas et Je sais / je ne sais pas.

Culioli5 oppose l'opération primitive de négation à l'opération construite de négation, étudiée à partir de l'analyse des marqueurs de négation et de leur évolution. Ces opérations mettraient toutefois toutes deux en évidence deux aspects fondamentaux : celui du rejet, qualitatif et subjectif, et celui, quantitatif, de l'absence ou plus largement du hiatus (ou discontinuité). Il évoque aussi l'altérité (« ce n'est pas cela qui est le cas »).

« Un contenu refoulé de représentation ou de pensée peut s'introduire dans la conscience sous la condition qu'il se fasse nier. La négation est une manière de prendre conscience de ce qui est refoulé, et même proprement une suppression du refoulement, mais qui n'est cependant pas une admission de ce qui est refoulé... Il en résulte une sorte d'admission intellectuelle de ce qui est refoulé, l'essentiel du refoulement subsistant néanmoins. »

Négation logique et négation linguistique

La notion de négation est intimement liée à celle de vérité, envisagée comme l'adéquation entre une représentation mentale (ou son expression), et son objet dans un monde référent ; on parle de sémantique vériconditionnelle.

La question de la vérité par elle-même dépasse le cadre de la discussion : tout énoncé linguistique peut bien sûr être entaché d'erreur ou d'approximation, ou encore être volontairement faux (mensonge).

Logique classique

En logique classique, toute proposition est considérée, soit comme vraie, soit comme fausse (principe du tiers exclu), ce qui s'énonce : {\displaystyle A\vee \neg A} (le symbole {\displaystyle \neg } représentant la négation, définie comme un connecteur logique). La négation de la négation de A est équivalente à A. Il n'existe donc que deux valeurs de vérité possibles.

La logique est atemporelle : elle ne prend pas en compte l'évolution possible dans le temps des valeurs de vérité.

Dans les domaines basés sur la logique classique, comme la géométrie, il y a toutefois lieu de préciser dans quel cadre on se situe. Ainsi, « la somme des angles d'un triangle est égale à 180° » est une proposition toujours vraie en géométrie euclidienne, mais non dans l'espace, en raison de la courbure spatiale.

Outre le symbole {\displaystyle \neg } (Unicode U+00AC), on utilise parfois pour représenter la négation :

  • le symbole ~ (opérateur tilde, Unicode U+223C)18.Exemple : {\displaystyle p\Rightarrow \sim q} (p implique non-q)
  • l'opérateur littéral NOT ou NON, suivi d'une expression (prédicat) entre parenthèses.Exemple : NON(p).
  • le trait de surlignage (anglais : overline), comme dans le titre du roman de A. E. van Vogt, Le Monde des Ā, où Ā se lit en anglais null-A, en français non-A19.Exemple : {\displaystyle {\overline {A\cdot B}}} (fonction logique NAND).

Logiques intuitionniste et linéaire

En logique intuitionniste le statut de la négation est différent de celui de la logique classique puisque le tiers exclus n'y est pas reconnu et une proposition n'est pas équivalente à sa double négation. Plus précisément, dans cette logique on a {\displaystyle p\Rightarrow \neg (\neg p)}, mais on n'a pas {\displaystyle \neg (\neg p)\Rightarrow p}.

La logique linéaire propose une notion de négation linéaire ({\displaystyle A^{\bot }} ou {\displaystyle nil(A)}).

Divers systèmes ont été proposés20 pour prendre en compte des situations plus complexes, et des valeurs de vérité multiples. Ce sont essentiellement les logiques à 3 valeurs21 qui ont trouvé des applications en intelligence artificielle ; toutefois, la valeur intermédiaire (ici notée i) prend des significations différentes selon les systèmes. Ainsi :

  • dans le système de Stephen Cole Kleene, i signifie inconnu (la proposition est vraie ou fausse, mais on ne connaît pas sa valeur de vérité) ;
  • dans le système de D. A. Bochvar, i signifie paradoxal, ou dénué de sens, absurde. Ceci permet de traiter par exemple la proposition (due à Russell) : L'actuel roi de France est chauve (voir Description définie, et plus bas : Pragmatique de la négation) ;
  • le système de Jan Łukasiewicz permet de traiter l'avenir contingent ;
  • Philippe Cornu propose de tenir compte des propositions dont la valeur de vérité, constamment connue, peut changer au cours du temps (logique de l'instable)...

Par ailleurs, on peut aussi associer un degré, ou coefficient (de fiabilité, de vraisemblance, de précision... ; représenté par exemple par une valeur comprise entre 0 et 1) à une proposition, comme dans les systèmes experts de diagnostic médical, mécanique ou autre (voir Logique floue).

« Un contenu refoulé de représentation ou de pensée peut s'introduire dans la conscience sous la condition qu'il se fasse nier. La négation est une manière de prendre conscience de ce qui est refoulé, et même proprement une suppression du refoulement, mais qui n'est cependant pas une admission de ce qui est refoulé... Il en résulte une sorte d'admission intellectuelle de ce qui est refoulé, l'essentiel du refoulement subsistant néanmoins. »

La langue, dont le référent est le monde perçu comme réel et non un sous-système logique, ne peut se contenter d'exprimer une opposition absolue de type vrai / faux, ni même d'utiliser une logique comportant un nombre prédéterminé de valeurs (d'où la frustration que peut ressentir la personne devant répondre à un sondage d'opinion ne comportant que des questions de type oui / non, celles-ci n'étant destinées qu'à faciliter le traitement des réponses).

La négation au sein d'un énoncé peut notamment concerner :

  • la dimension temporelle (ou historique) (ex : Bonn n'est plus la capitale de l'Allemagne)
  • un élément particulier du prédicat (ex : Jean n'est pas arrivé à Paris dans une 2CV rouge peut se justifier, selon le cas, par la négation de Jean, de arriver, du temps passé, de Paris, de 2CV, de rouge..., ou de plusieurs de ces éléments)
  • une quantification ou l'expression d'un degré de scalarité (ex : Il ne gagne pas beaucoup d'argent ; je ne le vois pas très souvent ; cette soupe n'est pas chaude [elle est tiède])
  • la modalité (aléthique, épistémique, boulique...) associée à la proposition
  • l'expression (adéquation du terme, registre de langue...) (ex : il ne lui a pas demandé de sortir, il l'a fichu à la porte)
  • etc.

De plus, même lorsqu'à première vue une négation linguistique semble s'apparenter à une formulation logique, son interprétation n'est pas forcément la même. Elle n'a pas manqué une séance se comprend généralement comme "elle n'en a manqué aucune" ( "une" étant compris comme article indéfini : nombre de séances manquées < 1), alors qu'en « logique pure » on peut facilement formuler une combinaison des deux sens possibles de "une", article ou adjectif numéral cardinal en écrivant: (nombre de séances manquées < 1) OU (nombre de séances manquées > 1).

Enfin, contrairement aux langages logiques, les langues naturelles comportent toujours une part d'ambigüité, consciente ou non dans l'esprit du locuteur.

Langages informatiques

Tous les langages informatiques comportent un opérateur booléen NOT, ou son équivalent. Il s'agit d'un opérateur unaire (i.e., qui n'accepte qu'un seul argument). Placé devant un opérande unique, il inverse la valeur booléenne de cet opérande (il la transforme en son complément logique). Pour inverser la valeur d'une expression plus complexe, comprenant des AND et des OR par exemple, on joue habituellement sur les parenthèses.

Généralement, il existe aussi un opérateur de comparaison spécifique, incorporant la négation. ex. : != ou ne pour signifier not equal (donc différent), qui s'oppose à == ou eq (equal, égal). La comparaison distingue parfois entre l'égalité (même valeur) et l'identité (approximativement : même valeur et même type) : on utilise alors des opérateurs différents.

Par ailleurs, il peut exister un opérateur spécial réalisant le « complément bit à bit » (comme en JavaScript: ~). Celui-ci représente en quelque sorte une variété particulière de négation, spécifiquement informatique.

Enfin, il existe dans certains langages des valeurs particulières, dont la prise en compte oblige à élargir les tables de vérité booléennes habituelles. ex. : Null (peut indiquer que la variable n'a pas encore été initialisée), NaN (Not a Number) (résultat d'une opération incompatible avec les règles arithmétiques)...

« Un contenu refoulé de représentation ou de pensée peut s'introduire dans la conscience sous la condition qu'il se fasse nier. La négation est une manière de prendre conscience de ce qui est refoulé, et même proprement une suppression du refoulement, mais qui n'est cependant pas une admission de ce qui est refoulé... Il en résulte une sorte d'admission intellectuelle de ce qui est refoulé, l'essentiel du refoulement subsistant néanmoins. »

Polarité et négation

Le Yáng et le Yin sont des notions polaires complémentaires.

Par polarité, on entend habituellement une manière d'envisager un concept unique comme soumis à deux directions antinomiques, appelées pôles. Chacun des deux concepts polaires ne peut se définir que par rapport à son opposé, il n'a pas d'existence en soi. Ainsi il ne peut y avoir de pôle nord sans pôle sud, de pôle + sans pôle -, de Yáng sans Yin, etc. Selon les cas, on parlera d'opposé, d'inverse, de contraire, de contradictoire, de complémentaire, d'antinomie, d'antagonisme, de disjonction, de dichotomie, la différence entre ces termes n'étant pas toujours très nette. (Le terme de polarité est parfois entendu dans le sens restreint du seul « statut positif ou négatif de l'existence d'un événement »22).

Dans la langue, il est facile de relever des couples de termes de ce type, notamment parmi les adjectifs :

ex. : grand # petit, haut # bas, chaud # froid, nombreux # rare(s)...ex. : mâle # femelle, nuit # jour...

La polarité est souvent orientée conceptuellement, c'est-à-dire que dans de tels couples, l'un est connoté positivement, l'autre négativement. La connotation peut-être soit quasi universelle (fort # faible, gai # triste), soit culturelle (ex: gauche est connoté négativement dans de nombreuses cultures, le latin sinister signifiant gauche, mauvais, pervers, défavorable)23. Les manifestations linguistiques de la dissymétrie des termes entrant en relation de polarité sont très variées, allant du sens à la combinatoire des vocables : le fr. nuit peut souvent se définir comme « absence de jour », le fr. jour comme « l'absence de nuit » (même si l'absence de jour peut être seulement l'obscurité), mais c'est aussi l'espace de temps de 24h contenant l'absence de nuit et l'absence de jour ; on dit « haut comme trois pommes » pour marquer la petite taille, haut fonctionnant alors à l'instar d'un hyperonyme24,25.

Lorsqu'il existe des termes intermédiaires (tiède) ou dont la force excède celle des termes habituels (brûlant, glacé), on introduit la notion de scalarité (voir plus bas). Sinon, il s'agit d'antinomies considérées comme exclusives26.

En linguistique, on parlera d'antonymie, de plusieurs types selon la nature du concept considéré : complémentaire, scalaire, dual... L'application de la négation linguistique à un terme « polaire » ne produira un résultat logiquement prévisible que s'il s'agit d'une antonymie complémentaire (pas présent signifie bien absent). Si le concept est scalaire, le résultat est bien plus nuancé : pas chaud ne signifie pas forcément froid par exemple ; pas blanc ne peut signifier noir que dans des contextes particuliers... Dans le cas de l'antonymie duale (termes considérés comme opposés par l'usage), ce que signifie la négation de l'un des termes dépend fortement du contexte : pas de soleil peut signifier pluie ou lune, pas manger : boire ou jeuner, etc.

La négation appliquée à un quantificateur (tout, jamais, un, certains...) pose également des problèmes (voir plus bas), ces concepts ne semblant pas être bipolaires, mais tri- ou quadripolaires.

Enfin, pour un grand nombre de termes (dont la plupart des substantifs et des verbes), le concept de polarité ne s'applique pas, et la négation ne peut donc s'interpréter dans ce cadre : pas de papier ne signifie ni le contraire, ni l'inverse de papier (ce qui n'aurait pas de sens), mais : absence de papier ; ne pas écrire signifie s'abstenir d'écrire ou faire autre chose qu'écrire ; pas bleu signifie d'une couleur, quelle qu'elle soit, qui ne peut être qualifiée de bleue (et non pas orange)27.

En logique, deux termes sont dits contradictoires s'ils « englobent tout ce qui existe et excluent tout moyen terme » (ceci rejoint la notion de complémentaire), alors que deux termes contraires « ont un ou plusieurs moyens termes »28 (voir ci-après : La scalarité).

Otto Jespersen fait remarquer28 que les termes contradictoires sont souvent exprimés par des dérivés (malheureux, impossible, désordre, non-violence), alors que pour les termes contraires, on utilise très souvent des paires de mots de racines différentes : jeune / vieux, bon / mauvais, grand / petit. L'espéranto constitue une exception remarquable à cette règle, puisqu'il utilise systématiquement le préfixe mal- pour former les contraires (et ne- pour les contradictoires ; voir plus bas).

« Un contenu refoulé de représentation ou de pensée peut s'introduire dans la conscience sous la condition qu'il se fasse nier. La négation est une manière de prendre conscience de ce qui est refoulé, et même proprement une suppression du refoulement, mais qui n'est cependant pas une admission de ce qui est refoulé... Il en résulte une sorte d'admission intellectuelle de ce qui est refoulé, l'essentiel du refoulement subsistant néanmoins. »

La scalarité

Un concept est dit scalaire (du latin scala, échelle) lorsque les termes qui en relèvent peuvent être disposés de façon ordonnée sur un axe orienté (symétrique ou non) ; on parle aussi de gradation29. Exemples :

ex. : glacé ← froid ← frais ← (neutre) → tiède → chaud → brûlantex. : aucun → un seul → quelques-uns → un certain nombre → beaucoup → presque tous → tous

D'un point de vue logique, ces termes sont liés par une relation d'implication :

ex. : beaucoup implique quelques-uns, mais non l'inverse.

Selon certains, dans le cadre de la négation descriptive30, une loi d'abaissement s'appliquerait généralement :

ex. : Il ne fait pas froid peut signifier qu'il fait doux, tiède, chaud, mais non qu'il fait glacial.

Cette loi s'appliquerait également aux valorisations chiffrées :

ex. : Il n'est pas resté cinq minutes signifie qu'il est resté moins de cinq minutes (« pas même » cinq minutes) ;

et aux quantificateurs :

ex. : pas beaucoup (« moins que beaucoup, assez peu »), pas un seul (« aucun »).

Il n'est cependant pas difficile de trouver des contre-exemples :

ex. : Je ne fais pas les trente-cinq heures, moi ! signifie que je travaille beaucoup plus que trente-cinq heures ;ex. : Ça ne m'a pas coûté trois francs six sous.

Il faut également prendre garde à l'orientation argumentative. Ainsi, le terme peu (de) est orienté négativement (contrairement à quelques, un peu), et donc :

ex. : Il n'est pas peu fier signifie « il est très fier », et non « il est moins que peu fier ».

L'utilisation de [et] même permet de repérer une gradation :

ex. : Il est intelligent, et même génial.

À la forme négative, il est plus naturel d'inverser l'ordre des termes doit (loi d'inversion argumentative) :

ex. : Il n'est pas génial, ni même intelligent.mais Il n'est pas intelligent, encore moins génial est possible.

Il faut se rappeler que l'interprétation de qualificatifs tels que grand, haut... dépend de la classe d'objets considérés :

ex. : Cet arbuste n'est pas haut (il fait moins de 1,50 m par exemple) ; cet immeuble n'est pas haut (il fait moins de 15 mètres).

La rhétorique joue fréquemment sur l'ambigüité de la signification de la négation, selon qu'on se place dans le cadre des contradictoires ou de la scalarité.

Ainsi accepter et refuser semblent contradictoires, mais ne le sont pas si l'on envisage des situations intermédiaires telles que j'accepte, mais je ne prends pas la responsabilité des conséquences négatives éventuelles de cette acceptation, j'accepte, mais je ne pourrai agir en conséquence qu'au bout d'un certain temps, etc.

« Un contenu refoulé de représentation ou de pensée peut s'introduire dans la conscience sous la condition qu'il se fasse nier. La négation est une manière de prendre conscience de ce qui est refoulé, et même proprement une suppression du refoulement, mais qui n'est cependant pas une admission de ce qui est refoulé... Il en résulte une sorte d'admission intellectuelle de ce qui est refoulé, l'essentiel du refoulement subsistant néanmoins. »

Dans La nuit, tous les chats sont gris, le prédicat sont gris représente la négation de ont une couleur discernable. La publicité télévisée où deux ménagères exhibent chacune une chemise, l'une tellement blanche qu'elle est en fait légèrement bleue et l'autre tellement grise qu'elle paraît légèrement jaune, repose sur une notion de « gris » opposé à « blanc », donc sur une logique binaire. La marque concurrente, qui promeut un produit qui laverait « plus blanc », cherchera à utiliser les mêmes mots, mais en se plaçant dans une autre perspective, en remplaçant l'alternative blanc ou gris par un continuum dans lequel blanc n'est pas non-gris, mais l'une des extrémités d'une gamme qui s'étendrait d'un blanc idéal à un gris sale, synonyme de « comme s'il n'y avait rien eu de fait ».

Selon le linguiste Nølke, Larrivée36 il faudrait distinguer portée et foyer de la négation, le foyer étant, selon Nølke, « un segment de l'énoncé qui véhicule une parcelle d'information marquée comme essentielle », résultant de l'acte de focalisation. Touratier remarque que ce constituant apporte souvent « l'élément informatif central et le plus important de l'énoncé », ou encore le plus rhématique. Ainsi, selon la structure de la phrase, le foyer serait normalement :

  • dans le cas d'un syntagme nominal (SN) sujet + verbe intransitif : le verbe.

ex. : Jean fume → Jean ne fume pas

  • dans le cas d'un SN + verbe transitif + complément du verbe : le complément.

ex. : Jean fume le cigare → Jean ne fume pas le cigare

  • dans le cas d'un SN + verbe + circonstant : le circonstant.

ex. : Jean fume (le cigare) dans la journée → Jean ne fume pas (le cigare) dans la journée

Il est facile de voir que le cas des quantificateurs doit être traité à part :

ex. : Tous les hommes rêvent de Brigitte Bardot → Tous les hommes ne rêvent pas de Brigitte Bardot (= pas tous les hommes)

ainsi que celui des adverbes modalisateurs, qui ne sont pas des circonstants :

ex. : Paul n'a pas vraiment convaincu l'auditoire (= On ne peut pas vraiment dire que Paul ait convaincu l'auditoire) ; comparer avec :ex. : Paul n'a pas facilement convaincu l'auditoire (= Il l'a convaincu, mais avec peine).

 Sigmund Freud, cité par Émile Benveniste38, considérait que la négation pouvait traduire un refoulement, dans le sens d'un refus d'admission préalable :

« Un contenu refoulé de représentation ou de pensée peut s'introduire dans la conscience sous la condition qu'il se fasse nier. La négation est une manière de prendre conscience de ce qui est refoulé, et même proprement une suppression du refoulement, mais qui n'est cependant pas une admission de ce qui est refoulé... Il en résulte une sorte d'admission intellectuelle de ce qui est refoulé, l'essentiel du refoulement subsistant néanmoins. »

Selon Benveniste, « le facteur linguistique est décisif dans ce procès complexe », et « la négation est en quelque sorte constitutive du contenu nié, donc de l'émergence de ce contenu dans la conscience et de la suppression du refoulement » ; si le sujet conserve une répugnance à s'identifier au contenu, il n'a pas de pouvoir sur l'existence de ce contenu.

nier

La négation est aujourd'hui fréquemment analysée selon la théorie psychomécanique du langage de Gustave Guillaume. Les termes négatifs sont alors comparés et classés en fonction de leur charge négative : il existerait en effet, au cours de la construction de la négation en pensée, un mouvement de négativation, mouvement stoppé plus ou moins précocement selon que la négation est inachevée (comme la négation explétive) ou complète (comme la négation par non)..... 

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